Sur le trottoir visqueux et humide de crachats, ils ramassaient des morceaux de pelures d’oranges et de pommes, des queues de grappes de raisins, et les mangeaient. Ils faisaient craquer entre leurs dents les noyaux de reines-claudes pour en faire sortir l’amande. Ils ramassaient des miettes de pain de la grosseur d’un pois, et des trognons de pommes si noirs et si sales qu’ils n’en avaient même plus l’apparence. Et ces deux hommes portaient à leur bouche toutes ces choses repoussantes, les mâchaient et les avalaient. Et cela, entre six et sept heures, dans cette soirée du 20 août de l’an de grâce 1902, dans le cœur de l’empire le plus vaste, le plus flottant et le plus puissant que le monde ait jamais connu.
Jack London à Londres, « Le peuple de l’abîme », 1902
Je laisse aux économistes compétents le soin d’énoncer avec une légitime fierté de COMBIEN la richesse absolue a augmenté en 1,15 SIÈCLE. Je laisse à chacun le soin de dénombrer les chômeurs et perdants en tous genres de ce totalitarisme économique, qui laisse, malgré cet accroissement inimaginable des richesses, toujours autant de pauvres à la porte, et de plus en plus à la rue.
Quelle CROISSANCE ?