Les Murs Baladeurs (lieu commun,sculpture sociale)

Exposition du 4 octobre au 30 novembre 2006

Vernissage le jeudi 5 octobre à 18h00
Galerie de l'espace artistique et culturel
IUFM de Bretagne -Site de Rennes
153,rue de Saint-Malo -35043 Rennes Cedex

En 1996, lors d'une exposition au centre de radiothérapie de l'hôpital de Quimper, Pol Guézennec proposait une présentation (ici beaucoup amputée, réécrite par nos soins …) de ce collectif et du projet qui le sous-tend, à travers deux entrées.

L'immatériel d'une part :

Le concept des Murs Baladeurs, disait-il, c'est l'idée même de l'existence d'une entité artistique faite de plusieurs personnes, différentes, avec différentes cultures, différents états de connaissance, différents rapports à l'art et avec le désir d'art comme lien. C'est une tentative d'inscrire ces différents rapports à l'art et les poser comme marque de différents possibles considérés simultanément, comme ils existent de fait dans le réel :différents états de réels simultanés.Je souligne bien que la production des Murs Baladeurs est de plusen plus réellement interactive.(…)

Le matériau , le "social "de "sculpture sociale", c'est le lien, l'échange, la confrontation, l'expression des sujets. La volonté de sortir d'un rapport d'utilitarisme. Tous les sujets ont conditionné ce résultat et participé à la conception. Le matériau c'est donc d'abord cette forme d'énergie de l'échange humain qui est prise en compte au lieu de se volatiliser (parce que c'est un matériau très volatile). Ce matériau est canalisé dans une direction, fixé un peu comme quand on cherche à définir ce qu'est la matière même ou l'existence physique et la localisation de la pensée, dans le cerveau. Ou un peu comme la vie.(…)

La fonction : Les murs baladeurs ont donc une fonction d'agrégation d'énergie et de représentation de cette énergie. Cela ne se voit pas mais en vertu de cette fonction d'agrégation, tous les gens qui ont été associés à ce travail, et même le public, les spectateurs, sont transformés en sculptures vivantes, faisant partie de l'oeuvre sous un mode discontinu, le temps qu'ils y pensent ou qu'ils la fréquentent.

Le "produit" d'autre part :

Les peintures traduisent cela dans la dimension matérielle de l'oeuvre. Elles sont le produit de la dimension immatérielle, elles en sont la trace, ce qui à la fois explique et justifie leur style. Ce qui est peint représente indirectement les personnes. La peinture est le lieu des choix de chacun, sur le plan de l'image comme sur celui de sa mise en oeuvre, de la touche, de la forme agie par le corps. La peinture est une activité qui mobilise le corps. C'est le lieu de la responsabilité individuelle aussi (…) Contrôler les rapports de lumière, de couleur, de contraste (…). S'adressant au public il ajoutait : Prenez le temps de lire ces différences de touches, d'épaisseur, de fluidité, de geste, de transparence, d'opacité, d'ampleur ou de détail, entre les personnages, qui font le portrait des différences entre les personnes : c'est l'endroit de ces peintures où les individus sont des individus, comme des portes où chaque personnage raconte sa petite et grande histoire. Voyez que ces personnages regardent les personnes à qui ils sont destinés. Cette compréhension, c'est votre regard qui va la construire.
Puis, citant Malraux "les idées ne sont pas faites pour être pensées mais vécues", Pol ajoutait: "L'art ça sert à ça".

Dix ans après, l'aventure des Murs Baladeurs continue. Ils nous offrent avec cette exposition l'occasion de faire le point, et pourquoi pas, de faire avec eux un bout de chemin.

"Etre une bande car ce qu'il y a de bien dans une bande, en principe, c'est que chacun y mène sa propre affaire tout en rencontrant les autres, chacun ramène son butin, et qu'un devenir s'esquisse, un bloc se met en mouvement qui n'est plus à personne, mais "entre" tout le monde, comme un petit bateau que des enfants lâchent et perdent et que d'autres volent".
Cette citation de Gilles Deleuze, également retenue par Pol Guézennec, nous renvoie opportunément -à cause du petit bateau- au Radeau de la Méduse qui va hanter la galerie de l'espace artistique et culturel de l'IUFM, et plus et au-delà si affinités .


D.Le Duff, IUFM Rennes, 2006